IPSA AFRIQUE

Les partenariats futurs dans la politique étrangère du Sénégal

Par Fadilou Ababacar NDOYE, Doctorant en science politique, École Doctorale DGEP, Chercheur associé chez IPSA Initiative pour la Paix et la Sécurité en Afrique.

Parent pauvre des politiques publiques, angle mort des préoccupations immédiates des populations rappelant l’image des pièces de shekels remises au Premier Ministre-candidat Benyamin Netanyahou par un commerçant avec à la clé une comparaison de l’électeur à un enfant à qui l’on donne des bonbons pour le calmer, la politique internationale du Sénégal même si encore éclipsée par des impératifs nationaux n’aura pas reçu un écho aussi favorable que dans cette campagne pour les élections présidentielles de 2024.

Baignant dans un environnement sous-régional bouillonnant aux plans politique avec une « fièvre des kakis » , une dislocation des structures d’ensemble , sécuritaire avec des menaces multiformes caractérisées par les enjeux de terrorisme, de criminalité transfrontalière, d’hybridité des nouvelles formes de menaces (numériques, sanitaires, climatiques , alimentaires…),économique avec une situation de vulnérabilité et de dépendance à l’égard de certains acteurs internationaux , les jeux de puissance , idéologique avec un révisionnisme du « contrat continental » sous des allures d’une éclosion des vieilles querelles entre « immédiatistes et gradualistes » avec une déférence stricte au cadre «africano-africain», l’action extérieure du Sénégal cristallise les attentions.

Revendiquant une fibre africaine comme marqueur de son identité politique déclinée au travers de sa dénomination « Patriotes Africains du Sénégal pour le Travail, l’Ethique et la Fraternité », entendant collaborer avec l’ensemble des partenaires, le Pastef porté aux affaires avec une victoire aux allures de plébiscite en la personne de Bassirou Diomaye Faye entend faire souscrire au Sénégal un « nouveau contrat international ». Les terrains de la refonte sont ainsi assez élargis.

Ainsi, au niveau institutionnel, une attention particulière pourrait d’abord être portée au Ministère des Affaires Étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur (MAESE), très souvent catalogué à tort ou à raison de chefferie de la diplomatie sénégalaise. Sa place au rang protocolaire pourrait témoigner de l’importance de la « gestion des affaires du dehors » pour Dakar. Mais , sa portée géographique n’est pas de même à écarter. Il est désormais circonscrit non plus dans un cadre général sans mention de la desserte d’une zone précise mais plutôt avec une caractérisation de la dimension matérielle et géographique africaine. Le ministère « sporadique » de l’intégration africaine absent de l’attelage gouvernemental depuis la fin du premier mandat du Président Sall est pleinement érigé en portefeuille. En sus, de cela , l’intégration africaine autrefois éloignée des préoccupations vient avant la désignation d’affaires étrangères dans l’appellation de ce département passant désormais au Ministère de l’Intégration Africaine et des Affaires Étrangères (MIAAE).Le profil de son titulaire attire également l’attention. Des questions types sur parcours professionnel , ses affiliations politiques étaient au centre des tractations. L’interrogation principale qui pendait tourner autour de la question de déterminer s’il serait un diplomate de carrière issu des rangs de la Place de l’indépendance ou encore un acteur politiquede premier plan, type ancien Premier Ministre, Président d’Institution ou même un Fonctionnaire International…. Le choix sera orienté sur une ancienne fonctionnaire internationale, militante de Pastef, Yassine Fall. Ce qui annonce un début ou souhait de se poser en État soucieux de l’ordre multilatéral. Mais cela amène tout de même à poser la question de son autorité précise dans la détermination et la conduite de l’action extérieure. Cela d’autant plus qu’elle risque de subir une forte concurrence de la Primature avec désormais le Premier ministre Ousmane Sonko bénéficiant surtout d’une forte proximité dans la sous région. Ceci sans oublier le palais avec l’inamovible Conseiller diplomatique Oumar Demba Ba ayant traversé les deux alternances, soufflant directement à l’oreille des Présidents posant la question de son maintien.

L’organigramme de ce département pourrait également être passé au crible en épousant des préoccupations beaucoup plus contemporaines et avec un dépassement de la cloison entre directions thématiques et directions géographiques, une réorientation de certains pivots comme l’éclatement de la « Direction Afrique et Union Africaine» assez concentrée face aux chantiers d’attrait des pays dits de l’Alliance des États du Sahel (AES) et de construction continentale. La boucle pourrait être aussi envisagée à terme par une érection de la « Direction des Partenariats et de la Promotion économique et culturelle » au rang de ministère délégué auprès du ministre des affaires étrangères ou encore de l’économie surtout eu égard à la volonté des nouvelles autorités sénégalaises de revoir beaucoup de partenariats passés par les anciennes administrations, tenant compte des frontières assez tenues déterminées par les décrets de répartition des services. Pour un pays qui entend profiter pleinement de la diplomatie économique avec ses leviers d’attrait d’investissements et de développement international, l’absence d’érection du Plan Sénégal Émergent (PSE) en direction thématique pleine au sein de ce ministère même si le département de la coopération tendait à lui échapper n’était pas compréhensible. La fermeture à tour de bras de bureaux économiques principalement depuis des capitales occidentales et moyen-orientales ne pouvait pas non plus s’expliquer. Par ailleurs, sur le volet partenarial, une remise en cause de la théorie des cercles concentriques élaborée par le Président Senghor n’est pas à l’ordre du jour dans sa généralité. Même si des réajustements au fond pourraient se manifester. La République du Sénégal s’inscrit clairement dans une dynamique africaine avec une constitutionnalisation du continent dès le préambule, martelée à l’article 37 qui signe le serment présidentiel avec comme point d’honneur « de ne ménager aucun effort pour la réalisation de l’Unité africaine » , confirmée à l’article 96 qui consacre des possibilités « d’accords d’association ou de communauté comprenant abandon partiel ou total de souveraineté en vue de réaliser l’unité africaine » avec un ciblage de la zone africaine assumée dans son ensemble avec l’usage du déterminant quantitatif indéfini « tout » couvrant donc l’ensemble des régions africaines. La déférence au cadre africain semble être le marqueur de la stratégie internationale de Dakar. La ceinture de feu ou voisinage immédiat reste à coup sûr la première étape des pérégrinations.

Contrairement à l’alternance de 2012, tous les cinq voisins restent des pivots. La Gambie , la Guinée et la Guinée Bissau revêtent une importance particulière surtout au plan sécuritaire avec l’enjeu casamançais encore en cours , des réseaux de trafics en tous genres tels que la drogue , le bois , les armes ( incidents entre le Sénégal et l’Iran sur des livraisons d’armes dans cette partie du Sénégal d’où la rupture des relations diplomatiques en 2011) mais aussi économiques avec la liberté de circulation des personnes et des capitaux dans des points d’échanges tels que Diaobé, Karang , l’enjeu pétrolier autour de la frontière entre Dakar et Bissau conduisant à l’érection d’une Agence pour la coopération entre la Guinée-Bissau et le Sénégal (AGC). Avec le Mali, la relance de la coopération économique pour le premier partenaire commercial du Sénégal est à l’œuvre après l’aval du Président Sall sur la salve de sanctions contre Bamako. La dimension sécuritaire est aussi à l’épreuve avec une réactualisation des commissions mixtes de coopération donc d’échanges d’informations. Avec la Mauritanie, si les relations ont toujours été caractéristiques de « Je t’aime, moi non plus », le volet énergétique avec l’exploitation commune du Grand Tortue Ahmeyim ( GTA) raffermit les liens. Même si les frontières maritimes sont toujours empreintes de tensions entre pêcheurs sénégalais et garde-côtes mauritaniens. Mais le blocage pourrait subvenir autour de l’épineuse question brandie de « revitalisation des vallées fossiles » , point critique qui pourrait mobiliser l’ensemble des États membres du fleuve Sénégal à se dresser contre cette « nouvelle » clé de répartition retenue par le Sénégal loin des standards établis par le statut de l’Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS). Le Cap-Vert, État côtier pourrait jouer le rôle du « sixième voisin » et surtout être mobilisé par Dakar dans ses efforts de refonte des structures sous-régionales au regard de sa posture prudente à destination des États de l’AES.

Aussi, les relations avec Abidjan et Abuja pourraient également évoluer. Pour la première, au gré d’une personnalisation des rapports diplomatiques avec le Président Ouattara qui a eu à traverser trois présidents sénégalais dont celui qui se posait comme son parrain libéral à savoir le Président Wade et son ami le Président Macky Sall . Ce qui expliquerait d’ailleurs son absence à Dakar à l’occasion de la prestation de serment du Président Bassirou Diomaye Faye avec en lieu et place la réception du Président italien en visite à Abidjan. L’écart pourrait se creuser davantage sur les orientations en vue de la mise en circulation de l’Eco avec le passif libéral du Président Ouattara , ancien du Fonds Monétaire International (FMI), sa proximité affichée avec Paris. Mais aussi , face aux tentatives de redéfinition des Accords de Partenariat Économique (APE) malgré le mandat conféré à la Communauté Économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest ( CEDEAO) en vue d’une négociation d’ensemble du bloc ouestafricain. Le Nigéria, puissance régionale qui a eu une présidence tournante difficile avec les débuts du Président Ahmed Bola Tinubu pourrait nécessiter Dakar surtout au regard de ses positions tranchantes contre les pays de l’AES dont son voisin nigérien avec qui les frontières sont même allées jusqu’à être fermées. Revendiquant un «panafricanisme de gauche » avec une africanisation toute, le nouvel Président cible comme domaines prioritaires «la gestion des ressources naturelles, la diplomatie et la sécurité ». Ce chantier semble ne pas pouvoir prospérer sans l’établissement de partenariats avec les grands du continent comme au temps du Plan Oméga du Président Wade qui deviendra Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD) avec le Nigéria, l’Afrique du Sud, l’Algérie. Le chantier institutionnel n’est pas au centre des préoccupations retenues comme la continuité de la réforme de 2017 initiée lors de la présidence rwandaise de l’Union africaine, la place exacte de l’UA au G20 problématique en l’absence d’une politique étrangère africaine commune à des exceptions près sur certaines questions. Mais l’attitude d’un groupe de pays acquis précédemment au Président Sall reste aussi à surveiller comme facteur potentiel de blocage ou comme cadre facilitateur dans la poursuite du chantier de la construction continentale. On peut y mettre les Comores , la République du Congo ainsi que la République Démocratique du Congo qui ont fait preuve d’une proximité assez poussée avec Dakar sous Sall.

S’agissant du bloc occidental , la France revient en peloton de tête. Si ces relations avec Dakar sont traditionnellement présentées sous le sceau du « privilégié » , Paris se voit principalement opposer une fin de non recevoir sur cette partie du continent. Et pour une coalition qui compte dans ses rangs , un mouvement qui a eu à se dénommer « Frapp-France Dégage » avec pour figure de proue le député de Ziguinchor, fief de Ousmane Sonko, Guy Marius Sagna, proche de Nathalie Yamb, le futur de l’axe Paris-Dakar ne compte pas se simplifier. La table rase sera-t-elle le principe futur ou la continuité, l’exception ? Des enceintes de coopération telles que le séminaire intergouvernemental franco-sénégalais, des thèmes tels que le domaine militaire avec une révision du partenariat en matière de défense avec son volet « Éléments français au Sénégal » , la réforme monétaire , la politique migratoire avec l’accord de gestion concertée des flux migratoires, la rente mémorielle avec la restitution des biens culturels seront-ils toujours les enjeux de la coopération ? Un alignement sur des thématiques telles que l’environnement, la sécurité avec la déférence au Forum de Paris comme référentiel passant par un vocable similaire pourrait aussi faire sa mue passant par une appropriation africaine. Aussi, avec l’Union européenne et sa volonté de se positionner en acteur géopolitique , Dakar envisagerait dans l’immédiat une renégociation des accords de pêche, un retour sur la question de l’externalisation du phénomène migratoire avec un déploiement souhaité de l’agence européenne de gardes-frontières et de garde-côtes (FRONTEX) qui risquerait de buter sur l’hostilité des dirigeants déjà entre le feu de la présence militaire française et la demande d’immunité pénale pour les agents de FRONTEX. Les États européens ayant érigé le Sénégal au rang de « pays pilote » dans le cadre de leur stratégie africaine à l’instar de l’Espagne et de la Pologne pourraient aussi être amenés à revoir leurs fiches ainsi que les domaines de coopération surtout s’agissant du volet migratoire avec Madrid.

 

Pour les États-Unis , la question sécuritaire est essentielle mais l’accord de coopération militaire ouvrant certaines facilités sur le territoire sénégalais à travers la prise de sites stratégiques en cas de survenance d’attaques terroristes ou pour des raisons humanitaires pourrait faire réagir les nouvelles autorités de Dakar. Le sursaut de Niamey à l’encontre de Washington pourrait-il être un marqueur pour Dakar ? Sur l’accès préférentiel au marché américain avec le droit du développement, la place du Sénégal parmi les Etats éligibles à l’African Growth and Opportunity Act (AGOA) n’est pas menacée. Mais la synergie avec les autres États africains avec un rôle de tête de file autour de l’assouplissement des règles d’accès pourrait être une initiative portée par Dakar. Le dossier casamançais épousé par l’ambassade américaine de Dakar avec la désignation d’un « facilitateur ou Monsieur Casamance » conférant une dimension internationale à cette crise en usure risque aussi de revoir une révision des priorités d’autant plus que le Premier Ministre nommé Ousmane Sonko est maire de cette localité, développant une proximité poussée avec le Président bissau-guinéen Omaro Embalo. S’agissant de la Chine, la vitesse des investissements chinois sur le continent pourrait alerter. Et aux dernières nouvelles, son positionnement poussé sur le marché sénégalais avec des secteurs tous azimuts tels que les infrastructures et même l’épineux terrain du numérique où la course à la souveraineté est lancée avec le « Data Center de Diamniadio ». La bataille maritime avec la façade atlantique sénégalaise peut aussi cristalliser les attentions . Si les États-Unis marchent à visage couvert sur fond du dossier casamançais, la Chine essaie de mouiller les eaux de cette partie de l’Afrique malgré son virage affiché sur l’Est africain par une mobilisation des anciennes colonies portugaises ( Cap-Vert et Guinée Bissau) comme biais d’une pénétration surfant sur l’héritage colonial de Macao. L’exploration de nouveaux terrains de coopération comme celui sécuritaire ne semblerait pas de l’avis des dirigeants de part et d’autre. Du côté de Dakar , l’accent semble être donné à une africanisation des enjeux alors que Pékin observe encore la région comme « pré carré » agonisant de la France , dans lequel il ne faudrait pas recourir aux mêmes méthodes. Cette demande d’évolution vers le domaine militaire avait été formulée par l’ancienne ministre des affaires étrangères Aissata Tall Sall à l’occasion du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC) en novembre 2021, une première alternative dans une capitale francophone. Pour ce qui est de la Russie, la pénétration de l’ours aux postes frontières du voisinage a eu raison sans doute des positions équilibrées du Sénégal dans les enceintes internationales comme avec l’abstention à l’occasion du vote sur l’invasion russe en Ukraine et le vote en faveur d’une procédure d’enquête sur des allégations de violations des droits de l’homme au Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur ces territoires. La relation est appelée toutefois à évoluer avec une redéfinition des contours de la diplomatie russe très pointée quant à une stratégie informationnelle d’ensemble sur certains actifs français au Sénégal pour un pays où le rapport à l’information reste encore assez tenu. L’africanisation des problèmes africains face à une « diplomatie des milices » , ici avec Wagner aura t-elle raison sur de possibles collisions avec Moscou ? Pourrait-elle conduire Dakar à opérer un toilettage de la convention contre le mercenariat de l’Organisation de l’ Unité Africaine (OUA) datant de 1977 ?

Quid du monde musulman ? Avant dernier cercle concentrique sénégalais, cet univers concurrencé par la diffusion d’une diplomatie privée au travers des confréries musulmanes en place se présente comme un prochain saut à surveiller dans le cadre des excursions sénégalaises. Si les relations de longue date sont établies avec le Maroc, l’Arabie Saoudite, présentées d’ailleurs par Macky Sall dans son ouvrage Le Sénégal au cœur au titre des « pays amis » aux côtés de la France et des États-Unis, , les liens pourraient prendre de nouvelles tournures. La volonté d’adhésion du Maroc à la CEDEAO, patate chaude pour le moment côté dakarois pourrait clairement être tranchée par un niet assumé surtout au regard de l’ambition affichée par le royaume chérifien de mettre la main par son ouverture atlantique sur des partenaires commerciaux de premier plan du Sénégal. Du côté de Riyadh , la tendance pourrait s’observer dans le cadre d’une adhésion future ou non au club des pays producteurs d’hydrocarbures tels que l’OPEP mais aussi et surtout d’un probable parrainage de l’idée d’accès au club des BRICS. Les avancées turques sur la base d’une diplomatie économique d’envergure ne pourraient-elles pas connaître leur déclin pour un pays qui entend désormais faire profiter pleinement son secteur privé ?

L’intrusion iranienne déjà menaçante dans le courant des années 2010 avec des suppositions de déstabilisation en région méridionale sud pourrait aussi conduire à ménager les relations avec Téhéran. Les Emirats Arabes Unis zappés sous l’ère Sall en raison notamment de leur proximité légendaire avec la famille Wade surtout dans l’attribution de concessions portuaires avec DP World pourraient être un nouveau pied pour Dakar. Le Qatar avec son activisme bouillonnant sur le continent africain comme dans le cadre de missions de facilitation avec récemment l’accord de paix au Tchad pourra être intéressé par le Sénégal qu’il n’a jamais quitté d’ailleurs avec une forte implication dans le dossier du fils de l’ancien Président Wade , qui depuis lors a élu domicile dans ce pays. Sur la question palestinienne, enjeu mobilisant fortement l’opinion publique sénégalaise, l’orientation de Dakar est attendue sur ce coup. Ceci d’autant plus que la coalition au pouvoir est composée dans une proportion importante de personnalités religieuses du monde musulman. Un tour de vis des relations avec Tel-Aviv est-elle au centre des inflexions attendues ou au contraire le pays qui préside sans interruption aucune le comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien à l’Assemblée générale des Nations unies pourrait-il aller davantage sur le terrain de ses rapports en désignant un ambassadeur sénégalais en poste à Tel-Aviv, pourquoi pas Jérusalem ?

Pour les espaces non couverts par la diplomatie sénégalaise à l’instar de la zone Amérique du sud et du centre où la seule ambassade sénégalaise se trouve au Brésil malgré une forte présence d’une diaspora entendue comme acteur principal du développement national dans des pays comme l’Argentine, ainsi qu’une mobilité prenant des points de transit comme le Nicaragua, le Costa Rica, le Mexique , une protection consulaire densifiée passant par l’établissement de consulats ou même des débuts de consulats honoraires pourrait atténuer le besoin d’Etat d’assistance et donc de service public au profit des sénégalais de l’extérieur. D’autres régions comme les Balkans avec l’ex Yougoslavie précédemment sphères d’enjeux pour le Sénégal avec l’établissement de points de contacts dans des fora comme le Mouvement des Non-alignés ou encore le Kosovo que Dakar a reconnu dès 2008 au moment de la déclaration controversée d’indépendance , la zone Europe orientale , l’Asie du centre et du sud devraient aussi pouvoir être mobilisées dans une perspective non seulement de bloc alternatif face aux hégémons occidental et chinois mais aussi et surtout dans un souci d’absence d’exclusivité. Toutefois, sur le volet multilatéral, une diplomatie de contestation semble être en gestation avec une remise en cause du système international à l’image du Président Wade. Si ce dernier était parti en croisade contre certaines organisations internationales dont l’Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) dirigée pourtant à l’époque par le sénégalais feu Jacques Diouf en pointant l’absence de soutien de sa stratégie nationale d’atteinte de la souveraineté alimentaire dénommée Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et l’Abondance ( GOANA) , une remise en cause du statut de la Cour Internationale de Justice en son article 38 sur les « principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées » comme sources de règlement des différends internationaux , le ton du Président Faye a été donné dès l’entame de son mandat. Dans son allocution en date du 03 avril 2024, dans le cadre de son discours de veille de la fête de l’indépendance , il pointe « l’odieux système colonial et sa prétendue mission civilisatrice » comme un pied de nez à l’ancienne puissance colonisatrice mais aussi entre les lignes une adresse contre l’organisation du monde post-1945. Il sera intéressant à ce niveau de suivre l’adhésion, les remous du Sénégal quant à des bases telles que le Consensus d’Ezulwini, les candidatures portées dans ces structures internationales, le calendrier et l’ordre du jour des présidences tournantes sénégalaises , les domaines de la coopération envisagés , souhaités ( politique, économique, droits de l’homme , environnement…).

Les liens établis avec des structures de Betton Woods comme le Fonds Monétaire International bénéficiant d’entrées privilégiées sur Dakar en témoignent la proximité affichée entre sa directrice générale Kristalina Georgieva et le Président Sall peuvent aussi connaître un début de désenchantement. Même si la première audience accordée par le nouveau Président dès sa prise de fonction l’a été au profit du Président de la Société Financière Internationale, le sénégalais Makhtar Diop. Des structures comme la Francophonie, forte même d’un représentant personnel du Chef de l’Etat pourrait soit connaître leur apogée, soit même un début de concurrence. Un pas vers le Commonwealth ne serait-il pas à l’ordre du jour à la suite d’anciennes colonies françaises telles que le Gabon, le Togo ?

 

 

 

 

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