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COP28 : Quelles perspectives face aux défis climatiques et à la mobilité climatique ?

DECEMBER 1: World Heads of State pose for a group photo at Al Wasl during the UN Climate Change Conference COP28 at Expo City Dubai on December 1, 2023, in Dubai, United Arab Emirates. (Photo by COP28 / Mahmoud Khaled)

Par Aisosa ERHAHON

À la suite de la 28e Conférence des parties (COP28) à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), qui s’est tenue aux Émirats arabes unis, la communauté internationale se trouve à un moment crucial pour aborder la relation complexe entre les défis climatiques et les migrations, même si ce sujet n’a été que faiblement abordé. Cette analyse explore les résultats de la COP28 et évalue les perspectives de réduction des impacts du changement climatique sur les migrations forcées, en se penchant sur les complexités et les faiblesses potentielles des accords conclus.

Des engagements ambitieux et des cadres politiques

La COP28 a vu une série d’engagements ambitieux de la part des nations participantes pour lutter contre le changement climatique et son impact sur les migrations. De nombreux pays ont amélioré leurs contributions déterminées au niveau national, fixant des objectifs plus ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Par exemple, deux grands émetteurs de méthane, le Turkménistan et le Kazakhstan, ont rejoint le Global Methane Pledge, un accord volontaire conclu par plus de 150 pays pour réduire leurs émissions de méthane de 30 % d’ici à 2030.

En outre, des progrès ont été réalisés dans l’élaboration de cadres politiques qui traitent explicitement des migrations induites par le climat, en reconnaissant les droits et la protection des personnes déplacées par des facteurs environnementaux. Cependant, le diable se cache dans les détails, et l’efficacité de ces engagements dépend de la mise en œuvre effective des politiques et de l’allocation des ressources pour soutenir les communautés vulnérables. Si la rhétorique de la COP28 est encourageante, la communauté internationale doit rester vigilante et s’assurer que les promesses se traduisent par des actions significatives sur le terrain.

Le financement est apparu comme un thème central de la COP28, les discussions tournant autour de mécanismes de financement innovants pour soutenir à la fois l’adaptation au climat et les mesures liées aux migrations. Les pays en développement, en particulier ceux du Sud, ont fait pression pour obtenir un soutien financier accru de la part des pays développés afin de les aider à renforcer leur résilience et à gérer les migrations liées au climat. Le clivage Nord-Sud a persisté lors des négociations, les nations développées étant invitées à assumer une plus grande responsabilité en matière d’émissions historiques. Le résultat reflète un ensemble de compromis mitigés, laissant certaines nations sceptiques quant à la sincérité de leurs homologues plus riches à soutenir les communautés les plus vulnérables aux impacts climatiques.

Opérationnaliser l’adaptation et la résilience face à l’injustice et à l’inégalité :

La COP28 a marqué une avancée dans les discussions sur l’adaptation et la résilience en tant qu’éléments clés de la lutte contre les migrations induites par le climat. Comme le souligne le sixième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), “l’augmentation de la capacité d’adaptation minimise le risque associé à la migration involontaire et à l’immobilité et améliore le degré de choix dans lequel les décisions de migration sont prises”. Les pays ont reconnu la nécessité d’investir dans des infrastructures résistantes au climat, dans l’agriculture durable et dans la gestion des ressources en eau. Toutefois, le défi consiste à traduire ces discussions en actions concrètes sur le terrain.

La mise en œuvre des mesures d’adaptation nécessite non seulement des ressources financières, mais aussi un transfert de technologie et un renforcement des capacités, en particulier pour les pays en développement. Comme l’a souligné le président du Sénégal, Macky Sall, lors de la conférence, « L’Afrique reste à la traîne dans le processus d’adaptation car elle ne bénéficie que très peu de financements concessionnels et d’investissements verts. En conséquence, les pays africains s’endettent lourdement pour financer leurs projets verts, ce qui constitue une double peine pour le continent qui pollue le moins. L’Afrique ne demande pas une faveur particulière mais une approche juste et équitable de la lutte contre le réchauffement climatique ». Le succès de la COP28 se mesurera à la capacité des nations à mettre en œuvre ces stratégies de manière efficace, en veillant à ce que les communautés vulnérables soient équipées pour résister aux impacts du changement climatique et réduire la nécessité d’une migration massive.

Le défi à venir consiste à remédier aux déséquilibres de pouvoir et aux injustices historiques qui ont contribué à l’état actuel de la dégradation de l’environnement et des migrations forcées. La COP28 a peut-être jeté les bases de ces discussions, mais le chemin vers une justice et une équité véritable nécessitera des efforts soutenus et une véritable collaboration entre les nations.

Alors que la poussière retombe sur la COP28, le monde se trouve à un moment critique. Les résultats de la conférence reflètent à la fois les progrès accomplis et les difficultés persistantes à résoudre les problèmes complexes liés aux défis climatiques et aux migrations. La communauté internationale doit maintenant sortir des salles de conférence et se rendre dans les tranchées, où le succès de la COP28 sera finalement mesuré par l’impact tangible sur les communautés vulnérables, le respect des engagements financiers, et la réalisation de la justice et de l’équité face à un climat changeant. Les perspectives d’un avenir durable dépendent de la volonté collective des nations de transformer les promesses en actions et de relever les défis interdépendants du changement climatique et des migrations forcées avec urgence et détermination.

Sources :

Conférence des Nations unies sur les changements climatiques: https://unfccc.int/cop28

Commonwealth boss warns of mass migration unless climate cash delivered (2023): https://www.reuters.com/sustainability/climate-energy/commonwealth-boss-warns-mass-migration-unless-climate-cash-delivered-2023-12-11/. Reuters.

Climate Migration at COP28 (2023): https://environmentalmigration.iom.int/human-mobility-cop-28. IOM.

Climate Mobility Pavilion at COP28: https://climatemobility.org/event/cop28/. Global Centre for Climate Mobility.

COP28: African leaders urge robust financing for continent’s climate adaptation: https://www.afdb.org/en/news-and-events/press-releases/cop28-african-leaders-urge-robust-financing-continents-climate-adaptation-66499. African Development Bank Group.

Countries promise clean energy boost at COP28 to push out fossil fuels: https://www.reuters.com/sustainability/climate-energy/over-110-countries-set-join-cop28-deal-triple-renewable-energy-2023-12-02/. Reuters.

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